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alyssaworld - Page 6

  • Le Phare de P.D. James

    le-phare.JPGPhyllis Dorothy James (Pi.Do.Djeims) est femme, anglaise et écrivain ! Trois handicaps qui ne pardonnent pas pour certains Français. Mais attention ! Son petit dernier : 'Le Phare' est un piège. Pas de risque qu’il ne vous tombe des mains. Plutôt quelques agréables nuits blanches en perspective. Jusqu’au point final. Le lieu est magique : 'Combe Island', une île privée au large de la Cornouaille.

    Avec ses résidents permanents, ses rares invités VIP, ses neuf cottages, son manoir et… ses deux phares. Le phare automatique et le vieux phare. Quand le célèbre écrivain Nathan Oliver est retrouvé pendu à l’un des phares, le huis clos commence. Adam Dagliesh, qui vient enfin de réaliser (il était temps !) son amour pour la délicieuse Emma (ici, on se doit de penser "Jane Austen" et non "Gustave Flaubert"), maître de conférences en littérature anglaise à Cambridge, se retrouve privé d’un week-end en amoureux et envoyé illico presto sur l’île par son supérieur Harkness.

    Et c’est peu de dire qu’il va avoir… de la corde à retordre ! L’auteur s’applique à éplucher méticuleusement, jusqu’au plus profond de leur être, chaque personnage avec la délectation d’un enfant qui démonte ses legos sur le tapis de sa chambre. "J’essaie de trouver l’équilibre entre le style, l’intrigue et l’étude de caractère" explique-t-elle. "Chapeau", Madame la Baronne (PDJ fut anoblie par la Reine en 1990) vous méritez largement la mention "très bien" dans les trois matières.

    Le Phare de P.D. James

    Editeur : Fayard
    Publication :3/5/2006

  • Madame Bâ d'Eric Orsenna

    Etes-vous un peu poètes, c'est a dire capable d'aller un peu peu plus loin que le plaisir du sens où la musique des mots ? orsena-eric.JPGSans cela, comme moi au début de ce roman, vous passerez souvent à côté de bien des bons moments que réserve ce livre. Mais rassurez-vous. Vous ne pourrez pas échapper à son charme, si l'on peut dire, pédagogique. Madame Bâ, d'ailleurs fait profession d'apprendre. Elle nous apprend ici l'Afrique et, au delà, une part bien oubliée et enfuie de nous mêmes.

    Son scribe, un jeune avocat blanc qui prend sous sa dictée sa lettre au Président de notre République pour obtenir un visa de court séjour, nous dit tout : "
    Je suis un homme économique, madame Bâ, ... morcelé en dossiers et en hobbies, en heures et en minutes ... Je suis un amas de rondelles. Vous me réapprenez l'unité". Madame Bâ est ce que l'Afrique produit encore, des êtres dont le coeur et la tête font toujours bon ménage, enfin dans leur meilleur avatar. Unité aussi de soi et du monde, pour le meilleur et pour le pire. C'est un beau voyage de découverte de l'Afrique et du Mali qui nous est offert là.

    Mais c'est aussi un voyage dans l'Afrique qui perd sa boussole, qui a perdu ses lois et sa structure et se demande avec angoisse si elle a les moyens d'en acquérir d'autres. Les modèles qu'elle voit autour d'elle ne sont pas très convaincants. Lisez par exemple l'affaire de l'échangeur, une de ces escroqueries couvertes par l'aide au développement. Ou l'affaire des "ogres".

    Bien sûr, ce n'est qu'un roman et un très bon, mais il me laisse partagé. Cette compassion qu'il exprime est certainement la clé de toute tentative de rapprochement, d'aide véritable. Et que l'on balaie au passage dans notre propre cour. Mais il nous livre peu de clés pour ouvrir de nouvelles portes. Car celles dont nous disposons, tant le Mali et l'Afrique que nous même, ont échoué. Alors, s'en remettre au sort ? Ne reste-t-il que l'exil, comme semble le conclure ce livre ?


    Madame Bâ d'Eric Orsenna, Editions Fayard/Stock (2003)

  • Misère de la prospérité de Pascal Bruckner

    misere-de-la-prosperite.JPGSa thèse est simple : l'économie a perdu le statut de serviteur pour prendre celui de maître de nos sociétés. Elle est même en train d'atteindre celui d'une divinité, l'économisme, dont découle toute vérité, toute morale. Alors que une saine démocratie voudrait la prééminence du choix politique, l'économie n'étant qu'un des moyens.

    Le piège est terrible : la concurrence mondiale ouverte, facteur de productivité, devient un trou noir, car l'idéologie de l'économisme en rend la sortie impossible. Il faut tout sacrifier à cet objectif productiviste car toute position acquise est fragile et doit être défendue à tout prix, y compris tous les autres qu'un idéal humain peut espérer. Nouvel enfermement dans une logique impitoyable :instabilité structurelle, menace sur le rapport de l'homme au travail (au fait où pensez-vous que nous en sommes ?), urgence de la réussite 'la victoire ?), destruction corollaire des "freins" : famille, enracinement, relations sociales stables. Nouvelle patrie virtuelle à qui tout doit être donné, y inclus tout espoir de sérénité. C'est le même constat fait 30 ans avant Le rapport Meadows de Dennis Meadows.

    P. B. ne nie cependant pas les succès atteints qui sont loin d'être méprisables : santé, structure sociale ouverte, justice, explosion du savoir. Il serait absurde de jeter le bébé avec l'eau du bain.

    Mais ne virons pas à la nouvelle idéologie, l'économisme ultra-libéral, qui prétend que le marché a réponse à tout. Ne nous engouffrons pas encore une fois dans ces idées simples qui ont fait tant de mal. Le capitalisme et le marché, neutres au plan de l'éthique, doivent retrouver leur place. La vie publique et la vie politique, lieux du libre débat sur ces choix doivent être réhabilités pour libérer la vie privée de son enfermement économiste.

    Rude tâche, mais qui mieux que la démocratie à une chance de réussir ?

  • La Mélancolie de la résistance de Laszlo Krasznahorkai

    melancolie-de-la-resistance.JPGLà où un Vallejo - par exemple - nous liquéfie d’angoisse à coup de phrases courtes, étouffées, sur un tempo heurté, Laszlo Krasznahorkai y va d’interminables tirades, entrecoupées de digressions, qui ramènent inlassablement vers l’insaisissable substance qui imprègne ce roman : le mystère.


    Construction surprenante pour un exercice littéraire original et ensorcelant, comme le sont parfois les romans dont la trame repose moins sur l’intrigue que sur l’atmosphère suffocante qui y préside. ‘La Mélancolie de la Résistance’ reprend, cependant, les clés du genre, principalement la lente mise en place du malaise, le règne de l’ombre qui s’avance en nuages de doutes et de peur sur les protagonistes, avec pour subtilité qu’il progresse par strate, qu’il s’étend circulairement pour gagner tout l’univers de sa fragile héroïne, Mme Pflaum. Un univers qui s’en retrouve étriqué et qui ne lui laisse plus de refuge contre l’oppression et la folie de ses congénères.


    Krasznahorkai construit un cocon de mystère pour y faire germer des réflexions désabusées et grinçantes sur la société post-industrielle, ses déboires, ses oubliés, son humanité toujours suspendue aux fluctuations, aux contradictions du postmodernisme. Il dépeint un monde aveuglé d’images, plus à l’aise dans l’illusion que dans le réel. Autant de pistes qu’il fait bon de suivre, même s’il est parfois difficile de ne pas se perdre dans cette vision exagérément apocalyptique. Un roman à la construction magistrale qui déconcertera les moins patients quand les plus courageux seront agréablement récompensés.

     

    La Mélancolie de la résistance de Laszlo Krasznahorkai

    Editeur : Gallimard
    Publication : 9/11/2006

  • Avis sur le roman D’acier, de Silvia Avallone - fin

    Si j’ai aimé ce roman ? Je n’en sais rien. C’est loin d’être une lecture légère, une chape de plomb flotte au dessus des pages. La fin de la troisième partie m’a mise en colère, Silvia Avallone donne une fin somme toute dans la lignée du reste mais c’est un dénouement qui me semble un peu trop « facile », trop cruel, trop attendu. La quatrième et dernière partie qui fait 5 pages m’a en revanche bien plus touchée. C’est finalement une « jolie » fin porteuse de message que je traduis comme un contre-pied à la destinée, au fait que l’on peut aussi se choisir sa vie. Un petit reproche global cependant : des descriptions et des ressassements un peu trop nombreux, même si cela colle bien à l’atmosphère générale ; et peut-être aussi quelques clichés véhiculés (sur les hommes, la jeunesse, les femmes,…), le roman va loin dans les portraits…

    Au vu de la bande-annonce, le film (sorti le 5 juin 2013 en France) m’a l’air d’être fidèle au roman. A voir prochainement en ce qui me concerne, j’ai très envie de voir cette histoire en images… preuve que je m’en suis attachée… Et un bon moyen de connaître l’oeuvre pour ceux qui ne veulent pas lire le livre.

    D’acier, de Silvia Avallone (Acciaio, 2010)
    Traduit de l’italien par Françoise Brun
    Liana Levi, coll Piccolo, 2011, 387 pages